Les relations sexuelles entre époux sont-elles obligatoires ? La Cour d’Appel de Versailles a répondu par l’affirmative dans une décision de 2019.
Les magistrats ont prononcé un divorce aux torts exclusifs de l’épouse, parce qu’elle refusait tout rapport sexuel avec son mari depuis près de huit ans. Pour les juges, ce refus constitue« une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage, rendant intolérable le maintien de la vie commune ».
Cet arrêt pose principalement deux questions :
- À partir de quand le juge (qui s’immisce de facto dans l’intimité des couples) considère-t-il que la fréquence des relations sexuelles n’est plus normale ?
- De plus, à l’heure des débats sur le consentement et de la reconnaissance, par la chambre criminelle, du viol entre époux (depuis 1992), comment une juridiction civile peut-elle estimer qu’un refus d’avoir des relations sexuelles est une violation des devoirs du mariage ?
Il n’existe aucun texte concernant une obligation de relations sexuelles entre époux. Seuls peuvent être cités les articles 212 et 215 du Code Civil.
L’article 212 du Code Civil rappelle que les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance. L’article 215 du Code Civil définit que les époux s’obligent à une communauté de vie.
Il semble donc que les juges ont déduit de cette notion de « communauté de vie » une obligation de répondre positivement aux relations sexuelles.
Cette conception du juge pose surtout la question de la nécessité d’un texte sur le sujet. En effet, selon l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, toute ingérence d’une autorité publique dans le droit à la vie privée doit être prévue par la loi.
Enfin, il convient de citer l’article 4 de la Convention européenne des droits de l’homme, selon lequel « nul ne peut être tenu en esclavage ni en servitude ». Inscrire dans les textes une obligation aux relations sexuelles avec son mari, pourrait être rapproché d’un asservissement sexuel.