IRRESPONSABILITE PENALE: ce que dit vraiment la Loi… et la Cour de Cassation

À la suite de l’affaire Halimi, Éric Dupond-Moretti a promis de combler ce qu’il a qualifié de « vide juridique ». En effet, le garde des Sceaux présentera, à la fin du mois de mai, son projet concernant l’irresponsabilité pénale et la distinction entre « celui qui est pris de folie » et « celui qui est pris de folie parce qu’il a consommé des psychotropes ». Mais quel est réellement l’état actuel du droit ?

L’article 122-1 du code pénal précise en son alinéa 1er que « N’est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes ».

La loi du 25 février 2008 a consacré la distinction entre l’imputation matérielle et l’imputation morale. Dans une procédure pénale, il est possibled’imputer la matérialité d’une infraction à un individu, tout en constatant ensuite que son discernement était aboli au moment des faits. Cela débouche sur l’affirmation de son irresponsabilité pénale comme dans l’affaire Halimi.

Pour retenir l’irresponsabilité pénale de l’individu, il convient de rappeler les conditions de prise en compte des troubles mentaux auxquelles se rattachent les juges.

Premièrement, le trouble mental doit être établi judiciairement. L’impact de la maladie doit être démontré. Les juges recourent donc très souvent à une expertise médicale.

De plus, il faut démontrer l’existence de la maladie mentale au moment des faits.

Enfin, il doit exister une relation de causalité entre la maladie et l’acte accompli. Il faut que l’acte soit directement causé par la maladie, ou autrement dit, que la maladie soit la cause de l’infraction.

Dans le cas d’espèce de l’affaire HALIMI, la Chambre criminelle, dans son arrêt du 14 avril 2021, a retenu que les troubles psychiques de Monsieur Traoré avaient commencé le 2 avril 2017, et ont culminé dans la nuit du 3 au 4 avril 2017 (au moment des faits).

Ensuite, la Chambre criminelle retient que le fait que Monsieur Traoré ait consommé du cannabis ne fait pas obstacle à ce que soit reconnue l’existence de ce trouble psychique/neuropsychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes. En effet, aucun élément du dossier n’indique que la consommation de cannabis par l’intéressé ait été effectuée avec la conscience que cet usage de stupéfiants puisse entraîner une telle manifestation. Les juges retiennent donc que la maladie a bien été la cause de l’infraction et que la consommation de cannabis n’y change rien.

Enfin, la Cour de cassation précise que les dispositions de l’article 122-1, alinéa 1er, ne distinguent pas l’origine du trouble psychique ayant conduit à l’abolition du discernement.

Que ce soit à cause de l’alcool ou de la drogue, si l’intoxication a provoqué un trouble psychique ou neuropsychique abolissant le discernement du mis en examen, la responsabilité de l’individu ne peut être engagée. Mais il faut souligner que cette prise de substance doit entrainer un trouble psychique ou neuropsychique qualifié psychiatriquement, ce qui n’arrive que dans des cas extrêmement rarissimes.

Ainsi, les juges ne considèrent pas que la drogue ou l’alcool puissent être « un permis de tuer », puisqu’être simplement « bourré » ou « défoncé », ne constituera pas un trouble et permettra d’engager la responsabilité pénale de l’individu.

Les juges de la Cour de cassation ont adopté une vision stricte de la loi, estimant logiquement que, puisque l’article 122-1 du code pénal ne distingue pas l’origine du trouble, ils ne peuvent le faire à la place de la loi.

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