ARTICLE 24 : L’ETAT ACTUEL DU DROIT ET CE QUE PREVOIT (VRAIMENT) LE TEXTE

Le texte de l’article 24 prévoit que : «Est puni dun an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende le fait de diffuser, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, dans le but qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, l’image du visage ou tout autre élément d’identification d’un fonctionnaire de la police nationale ou d’un militaire de la gendarmerie nationale lorsqu’il agit dans le cadre d’une opération de police ». 

Cet article vient donc modifier la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, afin de sanctionner la diffusion de tout élément d’identification, dont le visage, des membres des forces de l’ordre en opération, dans un but malveillant.

D’un point de vue juridique, il n’y a pas de définition du « but malveillant », c’est à dire que chaque juge devra apprécier si la diffusion des images était malveillante ou non ; et du point de vue de la preuve, il apparait difficile de prouver le but malveillant.

De plus, les images peuvent être diffusées par un journaliste sans avoir d’intention malveillante, mais être relayées par d’autres internautes dans un but malveillant, ce qui relève d’une autre infraction. Dans ce cas, il convient de se questionner sur l’utilité de la création d’une nouvelle infraction.

En l’état actuel du droit, une circulaire de 2008 avait prévu que « les policiers ne peuvent s’opposer à l’enregistrement de leur image lorsqu’ils effectuent une mission », ajoutant que « les policiers ne bénéficient pas de protection particulière en matière de droit à l’image lorsqu’ils sont en service» ou encore que « la liberté de l’information prime sur le droit au respect de l’image ou de la vie privée dès lors que cette liberté n’est pas dévoyée par une atteinte à la dignité de la personne ou au secret de lenquête ou de l’instruction ».

À l’époque, on considérait donc que les forces de l’ordre devaient rendre des comptes, et qu’il n’était pas nécessaire de les protéger lorsqu’ils sont en service, étant précisé que lorsqu’ils ne sont pas en service les règles classiques du droit à l’image et de l’atteinte à la vie privée s’appliquent.

Le Gouvernement justifie cet article 24 dans un but de protection des forces de l’ordre, afin qu’ils ne soient pas victime de harcèlement, dû à la diffusion sur les réseaux sociaux, de leurs visages avec des appels à la haine.

Cela dit, selon les défenseurs des Droits de l’Homme, la création de ce délit porte une atteinte grave au droit d’informer, car « l’intention malveillante » ne sera appréciée qu’au tribunal, ce qui n’empêchera pas des poursuites d’être engagées contre un journaliste, voire l’interpellation et le placement en garde à vue de personnes étant en train de filmer. Cela pourrait alors dissuader les journalistes de diffuser les images, donc de faire leur travail. Enfin, la diffusion de ces images est apparue essentielle, car elle a permis de dénoncer et surtout de prouver des violences policières.

Le débat ayant débordé, et de loin, la seule sphère juridique pour prendre une tournure éminemment politique, le groupe LREM à l’Assemblée Nationale a annoncé la réécriture de l’article 24. Affaire à suivre donc !

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